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Un connecteur performant et écoresponsable pour les planchers composites bois-béton, est-ce possible

Dernière mise à jour : 19 nov. 2020

Vulgarisation scientifique : Minh-Van Thai, candidat au doctorat – Université du Québec à Chicoutimi et Université de Bordeaux
 

Article vulgarisé : Performance of Notched Connectors for CLT-Concrete Composite Floors Auteurs : Minh-Van Thai, Sylvain Ménard, Sidi-Mohammed Elachachi, Philippe Galimard

Date de publication : Juillet 2020

Journal : MDPI Buildings

DOI : 10.3390/buildings10070122

ISSN : 2075-5309

 

Introduction


Dans les années 1940, ont émergé les premières applications des composites bois-béton (timber-concrete composite - TCC). Ils étaient originellement destinés à la construction de ponts et à l’amélioration des planchers en bois existants [2]. Actuellement, le TCC est encore utilisé grâce à ses multiples avantages : bilan carbon avantageux et énergie grise moindre (quantité d'énergie consommée lors du cycle de vie du produit); bonnes résistance et rigidité; performances améliorées en incendie, en sismique, en acoustique et pour les conforts estival et hivernal ; facilité et rapidité de mise en œuvre, capacités de préfabrication et de déconstruction [2]–[4].


Récemment, les panneaux de bois lamellé-collé croisé (cross-laminated timber - CLT) - un produit de bois d’ingénierie relativement nouveau - fut adopté pour former un composite CLT-béton (CLT-concrete composite - CCC) destiné à la construction de planchers. Ce système hybride bénéficie, d’une part, des avantages mentionnés ci-haut des structures TCC traditionnelles, et d'autre part, d’une faible épaisseur par rapport aux TCC. Donc, pour une même hauteur totale d’un bâtiment TCC de 10 étages, le bâtiment à plancher CCC gagnera un étage de plus (11 étages).

Figure 1. Construction du plancher CCC : montage des panneaux CLT avec connecteur de plaque métallique préinstallé [5]


La structure TCC comprend trois composants principaux : le bois, la couche de béton et les systèmes de connecteurs. Le dernier composant a fait l’objet de nombreuses études afin de trouver un connecteur composite résistant et rigide, moins cher, mais rapide à fabriquer et à installer. Plusieurs solutions furent proposées telles que des clous, des vis, des boulons, des connecteurs d’entaille et des plaques métalliques. [2], [6], [7]. Parmi celles-ci, le connecteur d’entaille [8], [9] est considéré comme une solution potentielle qui est capable de satisfaire les exigences mécaniques et économiques. L’étude de Lukaszewska [2] a démontré que les entailles étaient facilement usinées dès la production des panneaux CLT. Toutefois, les performances mécaniques doivent être validées par des tests expérimentaux supplémentaires.


En outre, la déconstruction des planchers TCC provoque des enjeux écologiques. À la fin du cycle de vie du bâtiment, la démolition de l'ensemble de ce type de structure composite entraînerait une quantité importante de déchets solides (béton). Il est alors important de trouver un connecteur permettant une démolition de ces structures qui est rapide et écoresponsable.


Figure 2. Connecteur d’entaille


Tel qu’illustré à la Figure 2, le connecteur d’entaille est composé de la partie femelle du CLT, de la partie mâle du béton et de la fixation verticale (vis de renfort). Ce système agit tel un verrou bloquant le déplacement entre le bois et le béton. Notre étude a quantifié les effets de quatre variables sur les performances mécaniques (résistance et rigidité) du connecteur d’entaille pour les planchers CCC : la longueur du bord chargé du bois (longueur du talon - a), la profondeur de l'entaille (b), la longueur de la vis (c) et l'épaisseur de la couche de béton (d). Nous avons aussi été en mesure de valider l’aspect déconstructible de ce connecteur.


Tests de cisaillement des connecteurs


Nous avons effectué nos tests expérimentaux sur des planchers CLT de 175 mm d’épaisseur, formés de cinq couches (ou 5 plies), et dont les dimensions de surface étaient de 750 mm par 300 mm. Puisque le durcissement du béton provoque des échanges d’humidité entre les matériaux, nous avons mis en place une fine pellicule de polyéthylène pour limiter ce phénomène, puis nous avons usiné une entaille sur la surface supérieure de chaque plancher de CLT (Figure 3a). Pour renforcer le sens vertical du connecteur, nous avons installé deux vis entièrement filetées au milieu de l’entaille avec un tuyau en plastique et une rondelle (Figure 3b). Le tuyau avait comme fonction de séparer la vis du béton durci. Ce système facilitait le détachement des composants, une fois les tests terminés, permettant que les planchers soient déconstructibles. La procédure de chargement ainsi que les calculs de résistance (charge maximale) et de rigidité reposaient sur la norme EN 26891: 1991 [10].


Figure 3. Échantillon avec (a) le film de polyéthylène et (b) la fixation verticale


Résultats des tests expérimentaux


Résistance : Les tests expérimentaux ont démontré que les entailles (Notch) de 35 mm de profondeur avaient une résistance 50 % meilleure que celles de 20 mm de profondeur (Figure 4a). Toutefois, la longueur du talon (Heel length) n’a pas eu d’effet significatif sur la charge maximale (Maximum load Fmax) que peut supporter l'entaille.


Figure 4. Influence de la profondeur d’entaille sur (a) la résistance et (b) la rigidité


Rigidité : La Figure 4b illustre l’influence de la profondeur d’entaille (Notch depth) sur la rigidité (Stiffness). Nos résultats démontrent qu'une entaille plus profonde ne mène pas à un connecteur significativement plus rigide. Pour une entaille de 35 mm de profondeur, les lamelles de la première couche sont complètement enlevées. Ce phénomène pourrait s’expliquer par le faible module d'élasticité perpendiculaire de la deuxième couche. En plus, cette couche posée dans le sens perpendiculaire à la première serait moins résistante au cisaillement roulant (Figure 5).


Figure 5. Phénomène de cisaillement roulant du CLT [11].


Déconstructibilité : La longueur des vis (Screw length) et l'épaisseur du béton (Concrete thickness) n’ont pas influencé la rigidité et la résistance du connecteur. Ce résultat confirme que l’application de notre solution pour les planchers déconstructibles ne réduit pas leurs performances mécaniques (Figure 6b et c). Puis, comme les vis ne sont pas en contact direct avec le béton, elles peuvent être facilement dévissées à l'aide d'un tournevis filaire (Figure 6a). La prochaine étape de notre étude sera de confirmer l’hypothèse que les connecteurs sont déconstructibles, mais à grande échelle.


Figure 6. (a) Désinstallation des vis et influence de la longueur de vis et de l’épaisseur du béton sur (a) la rigidité et (b) la résistance


Remarques importantes


Les résultats de cette étude ont contribué à une meilleure compréhension de la performance du connecteur d’entaille. En bref :

  1. La rigidité du connecteur était significativement améliorée par la longueur du talon.

  2. La résistance du connecteur était significativement améliorée par une entaille plus profonde.

  3. La longueur de la vis et l'épaisseur de la couche de béton n'ont pas eu d'effets significatifs sur les performances mécaniques du connecteur.

  4. Suite aux tests, la désinstallation des vis a pu être effectuée avec succès, ce qui fait du connecteur à entaille une solution prometteuse et écoresponsable pour le plancher composite. Il faudra maintenant vérifier si cette désinstallation est faisable à grande échelle.

 

Références


[1] M. V. Thai, S. Ménard, S. M. Elachachi, and P. Galimard, “Performance of notched connectors for CLT-concrete composite floors,” Buildings, vol. 10, no. 7, Art. no. 7, Jul. 2020, doi: 10.3390/buildings10070122.


[2] E. Lukaszewska, “Development of prefabricated timber-concrete composite floors,” Ph.D. Thesis, Luleå University of Technology, 2009.


[3] A. M. P. G. Dias and L. F. C. Jorge, “The effect of ductile connectors on the behaviour of timber–concrete composite beams,” Engineering Structures, vol. 33, no. 11, pp. 3033–3042, Nov. 2011, doi: 10.1016/j.engstruct.2011.05.014.


[4] A. Frangi, M. Knobloch, and M. Fontana, “Fire design of timber-concrete composite slabs with screwed connections,” J. Struct. Eng., vol. 136, no. 2, pp. 219–228, Feb. 2010, doi: 10.1061/(ASCE)ST.1943-541X.0000101.


[5] WoodWorks, “Case study: Inspiration through Innovation At UMass Amherst, an Exposed Mass Timber Structure is a Teaching Tool,” woodworks, http://www.woodworks.org. [Online]. Available: http://www.woodworks.org/wp-content/uploads/UMass-Amherst-Olver-Design-Building-WoodWorks-Case-Study.pdf.


[6] M. Van der Linden, “Timber-concrete composite floor systems,” University of Technology Delft, Delft, Netherlands, 1999.


[7] D. Yeoh, M. Fragiacomo, P. Aldi, M. Mazzilli, and U. Kuhlmann, “Performance of notched coach screw connection for timber-concrete composite floor system,” WCTE 2008, 2008.


[8] C. Higgins, A. R. Barbosa, and C. Blank, “Structural Tests of Concrete Composite-Cross-Laminated Timber Floors,” School of Civil and Construction Engineering, Corvallis, OR 97331, Final Report Report No. 17-01, Dec. 2017.


[9] Y. Jiang and R. Crocetti, “CLT-concrete composite floors with notched shear connectors,” Construction and Building Materials, vol. 195, pp. 127–139, Jan. 2019, doi: 10.1016/j.conbuildmat.2018.11.066.


[10] EN 26891 : 1991, Timber structures. Joints made with mechanical fasteners. General principles for the determination of strength and deformation characteristics. European Committee for Standardization (CEN), 1991.


[11] A. Sandoli and B. Calderoni, “The Rolling Shear Influence on the Out-of-Plane Behavior of CLT Panels: A Comparative Analysis,” Buildings, vol. 10, no. 3, Art. no. 3, Mar. 2020, doi: 10.3390/buildings10030042.

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